Le 19 avril 2024, l’émission Openbox TV m’a accueilli aux côtés d’Alain Juillet pour décrypter un thème central, mais souvent négligé : l’éthique comme arme de guerre économique. À travers ce dialogue, plusieurs grandes problématiques ont été abordées, de la pression qui pèse sur les entreprises françaises aux normes internationales et à la question brûlante de la régulation.
Je vous propose ici un résumé de cet échange.
Le défi des entreprises françaises
Alain Juillet souligne que les entreprises françaises font face à trois forces de pression majeures : les États étrangers, les financiers et les ONG. Chacun de ces acteurs, au nom de l’éthique ou de la concurrence, impose ses règles, souvent biaisées, fragilisant nos entreprises malgré leurs performances.
Les ETI face à la complexité des normes
Pour Gilles Sabart, les entreprises de taille intermédiaire (ETI) sont en première ligne. Non structurées comme les grands groupes, elles n’ont pas toujours les moyens humains et juridiques pour gérer la prolifération de normes éthiques : anticorruption, RGPD, sanctions internationales, égalité ou encore gouvernance.
Conflits d’intérêts et réputation
La notion de conflit d’intérêts reste floue sur le plan juridique, mais puissante en termes de réputation. Une accusation portée par un média ou une ONG peut déstabiliser une entreprise non préparée. Pour Sabart, l’éthique ne réside pas dans le discours, mais dans les programmes de prévention et la capacité à prouver sa conformité.
L’éthique comme condition d’accès au marché
Désormais, toute entreprise doit démontrer sa conformité au travers de rapports extra-financiers (ESG, CSRD). Accidents du travail, gouvernance, égalité ou absence de corruption deviennent des critères incontournables. Ne pas documenter sa démarche éthique expose à la suspicion et à la marginalisation.
Pressions internationales et asymétries
L’affaire Alstom illustre la capacité des États-Unis à utiliser leur législation anticorruption de manière extraterritoriale, souvent à l’avantage de leurs propres entreprises. Ce déséquilibre révèle un manque de réciprocité et une vulnérabilité européenne face à une concurrence parfois hypocrite.
ONG, activistes et fonds d’investissement
ONG et fonds activistes se présentent comme des contre-pouvoirs, mais poursuivent parfois des intérêts opaques. Faute de régulation stricte, leur action peut aller jusqu’à détruire des entreprises, comme dans le cas de Casino, sous prétexte de défendre l’éthique ou les actionnaires.
Vers une gouvernance plus transparente
Le débat met en lumière l’exigence croissante d’une gouvernance équilibrée et transparente. Tant sur la prévention de la corruption que sur les droits des salariés, l’éthique doit être structurée et prouvée. Loin des slogans, elle devient un instrument de compétitivité dans la mondialisation.
L’Europe et ses responsabilités
Face aux excès extraterritoriaux américains, l’Europe doit s’armer juridiquement et défendre ses champions industriels. Certaines avancées comme le RGPD montrent que l’Union peut créer ses propres normes protectrices et contraignantes, mais un effort de régulation coordonnée reste urgent pour protéger les entreprises européennes.
Conclusion
Ce débat révèle une évidence : l’éthique est devenue une arme économique. Non seulement elle conditionne l’accès aux marchés, mais elle sert aussi d’instrument de domination.
Les entreprises françaises doivent s’adapter, mais surtout anticiper, en se dotant d’outils de prévention solides et en exigeant une régulation équilibrée au niveau européen.